La place du commerce dans la ville doit être plus que jamais soutenue

Quelques principes d’actions en temps de Covid

La période que nous vivons change le visage de nos villes, car elle a des impacts visibles sur l’activité commerciale. Pendant les deux mois de confinement, les commerçants qui ont su faire face ont mis en œuvre des modes de fonctionnement appelés à durer. Trois bonnes pratiques, en particulier, retiennent l’attention.

L’entretien d’une communauté de clients fidèles via les réseaux sociaux a plus que jamais compté pour poursuivre son activité. Par exemple, pour les commerces qui ne pouvaient pas maintenir leur espace de vente ouvert en continu, en donnant rendez-vous à des horaires adaptés ou en livraisons. Être client d’une boutique en période de Covid s’est presque apparenté à un acte militant : engagement qui devra être entretenu, face aux promesses de « l’achat sans risques » des pure players.

Outre la visibilité numérique et l’activisme sur les réseaux sociaux, on retiendra évidemment la capacité à mettre les clients en confiance, dans l’organisation des flux et le respect des précautions sanitaires au sein des espaces de vente.

Enfin, la gestion de l’approvisionnement est confirmée comme une fonction vitale au commerce : ceux qui ont su tisser des liens durables avec leurs fournisseurs sont bien mieux armés lorsque les livraisons quotidiennes ne vont plus d’elles-mêmes (on a eu tendance à l’oublier dans une société hypermobile, mais la logistique a un coût et des contraintes qui sont réapparus subitement).

Ces bonnes pratiques sont appelées à durer parmi les commerçants résilients. Mais pour conforter la place du commerce dans la ville dans la période incertaine qui s’ouvre, les collectivités devront évoluer vers un rôle d’anticipation et de facilitation, en considérant cette activité comme une ressource essentielle. Ce rôle peut s’exercer dès à présent, notamment sur deux volets : l’adaptation des espaces publics à l’activité commerciale, et l’accompagnement des néo-commerçants.

Les espaces publics présentent le double intérêt d’offrir un environnement actuellement plus apaisant que les magasins pour le client, et d’être totalement à la main de la collectivité. Celle-ci peut donc préfigurer de nouveaux usages sur ces lieux, pour en faire un prolongement naturel des commerces et soutenir leur activité de façon très concrète. Ainsi, la prochaine saison estivale pourrait être mieux traversée par les restaurateurs si les règles d’occupation du domaine public étaient aménagées pour leur permettre d’exercer leur activité. Cette approche pragmatique doit aussi être appréhendée sur le temps long : sans verser dans la marchandisation du domaine public, celui-ci peut être mieux utilisé pour orienter et accueillir le client courageux, qui sort de chez lui et lève le nez de sa tablette.

L’accompagnement des projets de nouveaux commerçants est un terrain de jeu moins naturel pour les collectivités, mais qui va pourtant devenir central pour toute politique de revitalisation de centre-ville. C’est un fait : de nombreux commerces vont fermer des suites de la crise. Mais la crise économique va également susciter de nouvelles vocations parmi les actifs dont l’emploi est menacé : le commerce, activité ancrée dans les territoires, offre un débouché évident aux projets de reconversion professionnelle, notamment parmi les populations de cadres disposant d’une mise de départ. Cette dynamique peut être entretenue par la puissance publique : par exemple, via la mise à disposition de structures d’accompagnement dédiées, de type incubateur de commerces, ou encore en assurant un travail de veille pour anticiper les départs en retraite qui se profilent sur les prochaines années et identifier suffisamment tôt les fonds à céder.

Enfin, ces premières pistes de travail ne doivent pas faire oublier la nécessité d’équité fiscale, entre commerce physique et e-commerce. Alors même que les grands acteurs numériques sortent renforcés du confinement, et que les commerces physiques, bien que très affaiblis, bénéficient d’un regain d’attention, il est essentiel de garantir de justes règles de concurrence entre ces deux formats. Par exemple, en se penchant plus sur les modalités de taxation de la livraison à domicile, dont le coût environnemental reste très élevé.